Contrairement à ce que beaucoup pensent, j'affirme ici que toute activité scientifique (y compris en mathématiques) se constitue (en son langage) et se décrit (dans son métalangage) par l'usage de métaphores. La pensée prend son essor en s'appuyant sur des métaphores ; plus généralement, le "rhétorique" apparaît constitutif de l'activité scientifique comme de toute économie noétique. Il n'est donc a priori nullement illégitime de penser théories et modèles en terme d'images et de représentations. Mais le grand problème, ici, tient dans le choix des "bonnes" métaphores, des métaphores véritablement fécondes et dans leur contrôle[page ]Chevallard1992
Dans une situation didactique sont en jeu un ensemble d'objets mathématiques
, sous-ensemble fini dans le cadre d'une institution donnée Chevallard1987, et un ensemble d'acteurs
, dont les univers cognitifs
sont, à un instant donné à mettre en regard avec l'univers de l'institution
dans la mobilisation d'une tâche.
En posant
, définir une distance
entre deux univers cognitifs de deux acteurs peut être imaginé ; par exemple en quantifiant la relation d'un acteur à un objet,
,
peut être représenté comme un nuage de points de
, où
est l'ensemble des objets mathématiques de l'institution
, une distance (si une métrique peut être établie) entre deux univers cognitifs pouvant alors être définie comme la distance entre deux nuages de points.
Une situation didactique apparaît alors comme une transformation (un ensemble de transformations) de
, c'est-à-dire un système dynamique de l'espace
. L'orbite d'un point
de
est la suite
que l'on peut voir aussi comme les suites des univers cognitifs d'un élément de
(ensemble des acteurs) en fonction du temps. En définissant une distance
sur
, on construit un espace métrique. L'espace métrique
n'est pas a priori complet, puisque la connaissance visée dans l'institution décrit comme
n'est pas un élément de
. Mais, on peut considérer le complété de l'espace métrique
, ce qui correspondrait à rajouter les limites des orbites des systèmes dynamiques, parmi lesquelles se trouvent
, considérée comme l'ensemble des rapports d'une institution aux objets en jeu dans la situation. Le but de l'enseignement est alors de faire converger (ou au moins s'approcher) les orbites des univers cognitifs des élèves de la dynamique de
.
En d'autres termes, l'environnement dynamique décrit par Rogalski2003 correspondrait à la dynamique d'un ensemble de transformations sur les relations des acteurs et des objets mathématiques potentiellement travaillés Aldon2007, Aldon2010c dans une situation didactique.
En se référant à cette métaphore, deux types de dynamique peuvent être intégrées, liées à l'espace temporel utilisé : un incident peut créer une perturbation locale c'est-à-dire une modification qui peut être profonde de la trajectoire locale sans pour autant modifier la trajectoire à long terme. Si on pense, par exemple à la dynamique des fluides, un obstacle (incident local) peut provoquer un tourbillon (une modification importante de la trajectoire) mais sans pour autant modifier fondamentalement l'écoulement à long terme. Enfin, et pour continuer sur la similitude avec la dynamique des fluides, deux points de vue peuvent être adoptés :
Le choix d'une approche ou d'une autre conditionne la méthodologie et comme il sera développé dans le second chapitre, c'est plutôt l'approche lagrangienne de la dynamique que j'ai privilégiée en suivant les acteurs (professeurs et élèves) dans l'évolution de leurs relations aux différents savoirs rencontrés, plutôt que de m'attacher au suivi d'un objet mathématique particulier.
Enfin, et comme je l'ai déjà décrit dans le paragraphe page
, un des aspects importants de la problématique est de considérer les perturbations créées par l'introduction de la technologie dans les classes. Il s'agit donc de prendre en compte la nature des relations des acteurs à la technologie et des modifications ainsi engendrées.
Gilles 2012-03-05